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vendredi 29 juillet 2011

Pensée subversive n°030 "De l'intériorité et de l'extériorité"


«Celui qui a la chance de se souvenir des intonations de la voix de sa mère datant de l'époque où il ne savait pas encore parler, celui-là, pourra devenir un véritable musicien.»

En effet, il pourra comprendre l'abstraction musicale indépendamment de tout langage parlé, de toute littérature. Dans une chanson, la musique, c'est ce qui reste quand on enlève les paroles. Beaucoup de personnes ne comprennent la musique que comme illustration, enjolivement des paroles. Elles sont incapables de concevoir la matière musicale propre, ce qu'elle a de réellement spécifique. Le véritable musicien, lui, conçoit cette matières musicale comme primordiale, comme précédent tout langage parlé.

«Celui qui a la chance d'avoir conservé quelques souvenirs de l'époque ou il ne distinguait pas encore la différence entre ce qui lui était intérieur et ce qui lui était extérieur, celui là, pourra devenir un véritable créateur, et pourra aborder la vie avec une sagesse authentique.»

Tout au début de notre vie, avant que nous ne prenions conscience de notre enveloppe et de nos limites, nous recevions des stimuli extérieurs. Quand on propose quelque chose de «susceptible d'intéresser» un petit bébé à celui-ci, on lui demande de renoncer, au moins momentanément, à sa vie intérieure, à ses rêves, à son imagination, pour qu'il se concentre sur l'objet qu'on lui présente. C'est d'habitude quelqu'un qui est déjà initié à la connaissance de la ligne de démarcation entre «soi» et «non-soi» qui lui demandera de renoncer à son «intériorité» pour tourner son attention vers l'extérieur.

Si, en grandissant cet enfant continue trop longtemps à ne pas faire de différence entre intériorité et extériorité, sa maman, son papa, ses frères, ses sœurs, ou toute autre personne l'entourant, bref, l'amorce de ce qui sera pour lui plus tard la société, va lui faire «sentir» cette différence.

En effet, si il persiste à déféquer et uriner partout, à mordre, à s'approprier le bien d'autrui, il finira par «se prendre une gifle en pleine face». Il sentira alors dans sa propre chair la limite entre la main d'autrui et sa joue brûlante! Et il s'en souviendra...

Cet apprentissage de la limite entre intérieur et extérieur est extrêmement traumatisant pour la plupart d'entre nous.

On peut soupçonner, en général, que le plus grand nombre va se résigner à devenir complètement muet. Nous arrêtons alors toutes formes d'expression. À la place, nous copions ce que nous voyons, ce que nous entendons à l'extérieur, et qui produit un effet que nous essayons de détourner à notre propre profit.

Il s'ensuit donc, que pour un temps plus ou moins long, voire définitivement, nous n'exprimons plus du tout notre monde intérieur.

Par contre, si nous voyons quelqu'un qui sait se rendre aimable aux autres, quelqu'un qui nous «séduit», nous recopions ses actes, ses paroles, bref, nous essayons de lui ressembler afin de bénéficier à notre tour de ce pouvoir de séduction.

D'autres réagissent en se désintéressant de la partie «dangereuse», la partie «sociale», du monde extérieur en se concentrant sur une partie plus «sécurisante», et plus «minérale».

On ne peut néanmoins dissimuler entièrement son être intérieur au regard d'autrui. La façon même dont on sélectionne les éléments qu'on accepte de manipuler, les attitudes qu'on consent à imiter, tous ces éléments reflètent notre monde intérieur. Mais, ce qui en ressort alors est exposé à notre insu.

Bien sûr cette explication est beaucoup trop simpliste pour décrire le détail de la réalité. La psychanalyse, la psychologie ou la psychiatrie en étudiant les diverses pathologies psychiques, en tire un tableau infiniment plus complexe. Mais il n'est pas question ici de détailler les affections morbides, il s'agit d'une simple esquisse du sort commun aux êtres humains dits «normaux».

Ainsi, les personnes qui ne sont plus capables d'exprimer une vie intérieure, ne sont pas non plus à même de percevoir, ou d'exprimer la limite entre intériorité et extériorité. En effet, elles se sont réfugiées dans l'extériorité de façon a éviter que leur vigilance ne soit prise en défaut, et de recevoir de nouveaux une gifle en pleine face: «On ne m'y reprendra plus!». Elles deviennent ainsi incapables de gratuité, car inaptes à s'adonner à un acte venant véritablement de l'intérieur et allant vers l'extérieur.

La gratuité est alors remplacée par l'échange de ce qu'on a reçu de l'extérieur en héritage, contre quelque chose provenant aussi de l'extérieur: le bien convoité. La personne se trouve alors complètement dépendante du corps social qui lui garanti en contre-partie le respect de ces biens qu'elle a récoltés, qu'elle s'accapare, et qu'on nomme «propriété».

L'intériorité réelle, est alors remplacée par une intériorité sociale symbolique: la propriété. L'identité réelle de l'individu s'en retrouve complètement mise à l'écart, et remplacée, elle aussi, par une identité tout aussi symbolique que sociale, définie entièrement par les biens sociaux accumulés, qu'ils soient matériels, culturels, spirituels, ou autres.

Les adolescents montrent bien comment un bien matériel, une paire de chaussure de «marque» par exemple, peut devenir un élément essentiel de leur identité culturelle. En effet, les chaussures seront vues et reconnues comme signe d'appartenance à un groupement «tribal», «pré-social» avéré, alors que personne ne s'intéresse aux signes de leur malêtre, malêtre qu'ils préfèrent d'ailleurs conserver secret.

C'est aussi la raison pour laquelle, le sujet que nous évoquons ici est rarement effleuré. Ce champ est généralement considéré comme superflu car les informations jugées «utiles» sont celles qui, véhiculées dans et par la société, permettent à des personnes «formatées» par celle-ci, c'est à dire, les personnes ayant renoncé à exprimer leur intériorité véritable, à bénéficier des opportunités que le corps social met à leur disposition.

Cette situation est déplorable, car pour être «ami de la sagesse», «artiste», ou simplement «créateur», il est absolument nécessaire de reconsidérer et exprimer cette frontière entre monde intérieur et extérieur.

Idéalement, il faudrait, étant enfant, être capable d'assimiler toutes les informations nécessaires à l'obtention d'un statut social d'adulte, tout en ayant conservé un psychisme de petit bébé, et cela, sans aucun traumatisme...

Revisiter le couple intériorité-extériorité amène aussi à revisiter la définition du mot «foi».

La petite histoire suivante, d'un monsieur accompagné de son fils d'à peu près huit ans, se montre révélatrice. Le papa expliquait:

«... selon moi, j'ai été guéri de cette grave maladie par une médecine alternative...».

Le gamin lui, n'était pas d'accord, et ajoutait:

«... non papa, ce n'est pas «selon toi», tu as été réellement guéri par cette médecine alternative, sans quoi tu serais mort aujourd'hui!».

La scène mérite réflexion.

Le père savait que pour guérir par cette médecine, il fallait y croire. Le fils, inquiet pour la santé de son père s'est retrouvé devant ce problème:

«Pour que mon papa ait une chance de guérir, il faut absolument que tout le monde y croie, il est donc indispensable que j'y croie moi aussi!»

Comment le fils peut-il donc se forcer à croire à quelque chose dont il ne sait rien?

Il a simplement décidé de dire «C'est la vérité!» même si on devait le torturer, même si il devait en mourir.

Et c'est là que réside l'exacte définition «sociétale» du mot «foi»:

«Quelqu'un croit «vraiment» à quelque chose, si il persiste à l'affirmer devant la torture ou la mort». On ne peut pas juger de la foi de quelqu'un plus avant que cela.

Cela n'a absolument rien avoir avec l'intériorité de la personne. Quand on dit que quelqu'un est un «vrai croyant», cela ne dit rien sur ce qu'il pense. En fait, personne n'en sait rien, et tout le monde s'en moque! Ce qui est socialement utile, c'est de savoir par avance que quand on le questionnera, le dit «croyant», répondra qu'il croit. La vérité et le mensonge ont exactement la même valeur morale et sociale, tant que le mensonge est assumé jusqu'au bout. Prophètes et escrocs fanatiques sont ici confondus!

Paradoxalement, si on sait par avance l'opinion de quelqu'un, et qu'on est certain qu'il n'en changera plus jamais, alors son témoignage, devenu purement mécanique, n'a plus aucune valeur! Quand un croyant dit «Je crois en Dieu», cela n'a aucune valeur en tant que témoignage «sociétal». Quelle est alors son utilité? C'est peut-être seulement quelque chose qu'il dit de peur de faire du mal, d'une façon ou d'une autre, à ses proches qu'il aime...

Bien sûr, tous les aspects de la «foi», ne sont pas résumés dans ces seules considérations. Il s'agit seulement ici de l'esquisse d'une définition «sociétale» du mot «foi», c'est à dire en tant que simple élément d'un langage, construit pour transmettre des connaissances entre les différents membres d'une société. Et en ce sens, on ne connaît jamais l'intériorité d'autrui, on ne fait que d'en percevoir certaines manifestations extérieures, sans jamais être certain de la réalité intérieure qu'elles recouvrent.

Un autre exemple vient de ces professeurs qui reprochent à certains de leurs élèves de réciter leurs leçons «par cœur» sans rien comprendre.

Comment le professeur peut-il savoir si l'élève a réellement compris ou non? En lui demandant de définir les mots qu'il emploie? Et si l'élève a étudié aussi toutes les définitions sans les comprendre?

Imaginons donc que cet élève a étudié tous les dictionnaires, toutes les encyclopédies par cœur, et qu'il se contente de relater ce qu'il a perçu, sans aucuns jugements internes... N'arrive-t-il pas alors à une véritable objectivité? N'est-il pas alors plus scientifique que son professeur qui le réprimande pour «ne pas comprendre», c'est à dire qui lui reproche quelque chose d'invérifiable, d'impossible à expérimenter, et que le maître, lui-même, est incapable de définir?

La réalité interne d'autrui n'est pas pénétrable, et si l'emploi du polygraphe comme «détecteur de mensonge» semble montrer quelques réussites purement statistiques, c'est que ses résultats sont certainement plus liés à la croyance superstitieuse des personnes examinées, qu'à l'infaillibilité de la machine. Le polygraphe connaît des échecs, son usage est d'ailleurs vivement critiqué, et les conclusions qu'on en tire ne tiennent heureusement pas lieu de preuves devant nos tribunaux.

On peut se demander si il n'existe pas d'autres moyens que le langage parlé, permettant de s'immiscer dans l'intériorité d'autrui.

Ce problème en fait penser à un autre, analogue mais plus simple. C'est celui de «pirater» un ordinateur à distance, sans y être connecté. Il est, paraît-il possible d'y arriver, en analysant les rayonnements électromagnétiques que celui-ci produit pendant son fonctionnement.

Mais, dans ce cas, il est évident que les seules données qui puissent être décodées, sont celles qui circulent dans ses circuits On ne pourra jamais, par ce moyen, connaître une information enfouie quelque part dans un disque dur. Il faudra pour cela qu'elle soit lue par un logiciel exécuté par le microprocesseur, la faisant ainsi circuler dans les circuits et provoquant le rayonnement qui pourra ensuite être capté et enfin décodé.

Si une quelconque «télépathie» est possible, alors, il y a de fortes chances pour qu'il en soit de même. Les souvenirs enfouis dans notre mémoire, ne devraient être accessibles qu'au moment où ils sont effectivement utilisées, véhiculés par nos neurones, consciemment ou inconsciemment.

Or, la réalité psychique d'autrui n'intéresse pas grand monde! Notre pensée est fluctuante, nous évaluons sans cesse nos futures actions en imaginant diverses hypothèses, diverses stratégies, contradictoires, et lorsque nous avons pris notre décision, nous enfouissons le résultat de nos cogitations dans notre mémoire, puis, nous ne «l'exhumons» qu'au moment où nous en avons besoin.

La société n'a que faire de ces considérations, elle n'a besoin que d'une parole donnée figée, et n'étant plus remise en question. Ce qu'elle relaye, c'est la donnée enfouie dans le disque dur, et ne circulant plus dans ces «dangereux» circuits qui pourraient à nouveau la modifier... Peu importe de quelle façon vous avez pris votre décision, tant que vous respectez votre parole, c'est à dire le contrat qui vous unit!

Celui qui en affaire laisserait transparaître son intériorité, serait connu comme un homme sans parole, et on lui prêterait même, peut-être, des intentions d'escroc! De toute façon personne ne rechercherait sa compagnie car il donnerait l'impression de parler constamment de sujets sans intérêt qui nous font perdre notre temps!

Les concepteurs de logiciels «d'intelligence artificielle» sont régulièrement confrontés à ce genre de problèmes. Ils devraient s'inspirer de la façon dont un être humain s'y prend pour résoudre un problème. Malheureusement, il n'existe aucunes données sur ce sujet. On ne s'intéresse qu'au résultat, et non à tous les détours, à toutes les hypothèses infirmées, qui sont nécessaires à son obtention.

Il se peut que la télépathie soit plus commune qu'on ne le pense, mais qu'elle n'intéresse personne.

Il se peut même que beaucoup de ces animaux auxquels on prête volontiers un sixième sens, seraient tout à fait capables d'élaborer un langage systématique de communication avec les êtres humains, mais qu'ils n'y sont pas du tout intéressés, déçus par le gouffre qui sépare la vie intérieure de nos semblables d'avec ses manifestations externes et dont le langage parlé fait partie.

Si la télépathie est possible, alors l'usage le plus probable qu'en fait l'être social, est celui de simple langage, pareil à la parole, permettant, tout comme n'importe quel discours, le paraître ou le mensonge, et ne servant pas plus que le parler, à la transmission de la véritable intériorité.

L'être humain tel qu'il se montre adapté à la société dans laquelle il vit, est loin de se montrer un modèle d'intégrité. L'honnêteté est jugée sur la constance de la parole donnée, et non sur la cohérence de l'ensemble de la personnalité interne et externe. L'être sociétal idéal ressemble plus à un être mécanique qu'à un être vivant.

Ces quelques exemples illustreront ce propos:

  • On appelle tantôt «rêve» le souvenir du rêve, le fruit d'une rêverie, une hypothèse, ou même un projet. Il n'y a guère que les neurologues qui emploient ce mot pour désigner la manifestation du rêve au moment même où il se produit. Le reste de la société ne parle que rarement de cela, et donc, ne lui attribue même pas de nom.
  • On fait appel constamment aux concepts de «volonté», et de «conscience», alors qu'ils ne jouent qu'un rôle tout à fait mineur dans notre fonctionnement. Si par exemple nous essayons de prendre conscience de chaque mouvement de notre langue, de la sélection des mots dans notre mémoire, de nos intonations, des souvenirs qui sont évoqués... pendant que nous énonçons une phrase, nous avons alors affaire à une tâche tellement complexe que nous en oublions immédiatement ce que nous voulions dire! La conscience est plus proche d'éclairs qui nous illuminent de temps en temps plutôt que d'une lumière qui éclaire incessamment notre vie. En général, nous faisons les choses avant d'en prendre conscience, et c'est le plus souvent la seule manière de les faire convenablement.
  • On oublie toujours que la majeure partie de notre vie est caractérisée par des modes intermédiaires entre état de sommeil et état d'alerte. En effet, il existe une multitude d'états plus ou moins hypnotiques, plus ou moins vigilants, qui comportent chacun un rapport plus ou moins délayé avec la conscience.
  • Le passé est loin d'être une réalité intangible sur laquelle nous pouvons nous reposer. Nos expériences passées sont constamment réinterprétées à la lumière de nos connaissances présentes, elles-mêmes remises à jour en permanence par le résultat de nos nouvelles expériences.
  • La réalité est une construction imaginaire, tirée de nos expériences. La réalité fluctue en fonction de notre évolution.
  • ...
Tout ceci nous montre que la vie en société altère profondément le rapport qui existe entre intériorité et extériorité, et que seul un perpétuel questionnement sur ce thème peut nous permettre de retrouver un semblant d'intégrité, liant enfin nos actions présentes et futures avec nos racines profondes.

Le comédien et acteur Claude Brasseur a énoncé une phrase qu'il est bon de conserver en mémoire afin de se donner une chance de la méditer dans les diverses circonstances de la vie:

«Je crois que les mots ont été inventés par les hommes pour cacher leurs pensées.»

Original: 20110729-00
Version: 20110731-02

mercredi 20 juillet 2011

Pensée subversive n°029 "De la vétusté et de la modernité"

La modernité n'est pas l'imitation de la modernité!

Le cerveau humain sert à modéliser et ainsi à essayer d'anticiper la nature qui entoure l'homme. L'intelligence de l'homme n'est donc que le reflet imparfait de la complexité naturelle.

Si l'intelligence de l'homme cesse d'être tournée vers l'extérieur, si elle n'a plus d'autre but que se comprendre elle-même, alors, elle cesse dévoluer.

La véritable modernité ne se situe donc pas dans les inventions générées par le cerveau humain, mais dans le nouvel ADN contenu dans l'ensemble des cellules vivantes.

Notre monde humain, façonné par nos dernières inventions «à la mode», nous sert à résister à la sélection et donc à l'évolution naturelle.

Ce monde est par définition «absolument vétuste», contrairement à la nature qui, elle, ne cesse de se transformer.

Original: 20110720-00
Version: 20110720-00

    Pensée subversive n°028 "De l'immobilité et du tombeau"

    Celui qui s'évertue à rendre la nature immobile, s'oppose à la nature de la nature.

    Celui qui veut arrêter l'évolution naturelle déteste celle-ci.

    Celui qui déteste la nature hait sa propre nature.

    Celui qui hait sa nature originelle a peur de son ombre.

    Celui qui craint son ombre, craint l'absence de lumière.

    Celui qui désire une lumière sans ombres, désire une obscurité sans lumières.

    Celui qui désire les ténèbres absolues aspire à vivre dans le tombeau.

    Original: 20110720-00
    Version: 20110720-00


    jeudi 4 septembre 2008

    Pensée subversive n°027 "De l'extraordinaire nature"


    L'homme prend tout doucement conscience de son impact sur la nature, aussi les documentaires traitant de ce sujet sont rémunérateurs, et deviennent légions.

    Pleins de bonne volonté, les commentateurs tentent de capturer notre attention en employant des superlatifs. On nous décrit des espèces «merveilleuses», «extraordinaires», «magiques», «époustouflantes», «fantastiques», «stupéfiantes»...

    Oublierait-on que le principe même du respect de la nature consiste à éprouver d'abord une profonde humilité pour le milieu dont on est issu? Si nos ancêtres avaient ressenti le besoin de cette nécessaire révérence, bien des espèces devenues rares seraient ordinaires aujourd'hui.

    Apprenons donc le respect de la nature en commençant par les pissenlits, les orties et autres moustiques, si nous ne voulons pas que demain nos petits-enfants s'émerveillent devant la beauté de leurs quelques «extraordinaires» descendants.


    Original: 20080904-00
    Version: 20080904-1



    vendredi 29 août 2008

    Pensée subversive n°026 "Des prophètes et du jugement dernier"

    Comment sait-on que Dieu est le seul dieu, et que c'est lui qui a créé le monde physique, chimique, biologique et enfin spirituel avec son image «l'homme»?

    Si on en croit les chrétiens, cela s'est produit par son Fils Jésus Christ qui l'accompagnait depuis toujours («Nul ne connaît le Père sinon par le Fils»). Pour les adeptes du judaïsme ou de l'islam, cette révélation remontrait à Abraham, qui y aurait cru plus qu'en sa propre expérience de la vie. Cela lui fut, dit-on, imputé à justice, et tous ceux qui eurent la même foi qu'Abraham, furent sauvés.

    A quelle édifice logique se réfèrent donc ces prophètes qui nous révèlent l'existence de ce Dieu unique et créateur?

    D'abord, ces trois religions sont dites «révélées», et elles interdisent donc à tout nouveau prophète d'avoir, indépendemment de celles-ci, la révélation du Dieu créateur.

    Ce point de doctrine permet de distinguer le Vrai Dieu (Officiel) s'étant présenté «de Lui-même» dans l'Histoire, des dieux que chacun peut imaginer, «par nécessité», n'existant que dans la pensée et qualifiés de «dieux des philosophes».

    L'adepte ne peut donc, par lui-même, recevoir la révélation de l'existence de son Dieu créateur. Celle-ci doit lui être apportée par un co-religionaire qui le relie à la tradition de sa confession. Ceci évite des interprétations dissidentes et potentiellement sectaires.

    Beaucoup de fidèles de ces trois religions abandonneraient toutes références à celles-ci, si ils connaissaient et avaient médité ce point de doctrine, pourtant évident et officiel.

    Ensuite, pourquoi ce Dieu, si il existe, se présenterait-il comme Unique et Créateur?

    Il est curieux de voir le Créateur de toute vie surenchérir sur les arguments des utilisateurs de raisonnements mégalomanes et machistes qui rendent les forts plus forts, et les faibles plus faibles.

    Il est aussi étrange de le voir se substituer à la foi de son disciple, celle-ci étant pourtant naturellement nécessaire à la validation de sa propre expérience.

    Il est étonnant de le voir obliger son prophète à disséminer cette révélation auprès de personnes ne l'ayant pas vécue elles-même, remplaçant ainsi la foi qu'ils ont en leur propre pratique par une expérience de crédulité, peut-être alors justifiée, mais créant ensuite un précédent autorisant tous les abus.

    Enfin, si on considère les effets négatifs des religions monothéistes sur la diversité des espèces et des cultures, il est bizarre de voir ce Dieu créateur de toute vie initier une pareille destruction.

    Finalement, au bout d'une existence consacrée à la foi en son Dieu, le fidèle se voit jugé par son Créateur.

    Sera-t-il alors condamné pour avoir conservé la foi en sa propre expérience, ou récompensé pour avoir cru en les dires d'un autre?

    Ou peut-être attend-t-on de lui qu'il aie transformé un dieu de pensée créé par lui et par nécessité, somme-toute un dieu des philosophes, en un Dieu se manifestant dans l'Histoire et révélé par autrui?

    L'adepte, pourra-t-il se retourner alors pour trouver quelque soutien auprès du prophète en qui il a fait confiance, ou, le verdict ne sera-t-il prononcé que sur la base de son expérience vécue propre?

    Si une personne conserve la foi irrationnelle dont elle a besoin pour valider sa propre expérience, si elle suit du début jusqu'à la fin sa propre détermination, si elle prend librement, et par elle-même, les décisions nécessaires à la poursuite de sa vie, alors, seule la fatalité peut avoir raison d'elle. En effet, au moment de rencontrer la mort, le chemin qu'elle aura poursuivi pour arriver à l'endroit de cet ultime rendez-vous aurait été pris de toutes façons. Elle n'en fera porter la responsabilité à personne d'autre qu'à elle-même.

    Dieu n'aimerait-il que les irresponsables?


    Original: 20080830-00
    Version: 20080830-4

    jeudi 28 août 2008

    Pensée subversive n°025 "De l'animal biologique et du temps présent"

    [L'animal est pris ici dans le sens de tout être vivant dépourvu des «spécificités» des êtres humains.]

    L'idée que se fait «l'humaniste» de l'animal biologique est compromise par le préjugé de supériorité que fait peser beaucoup de traditions religieuses (monothéistes en particulier) sur l'être humain.

    Ainsi, on charge l'animal biologique de causes finales lui interdisant d'avoir une véritable existence propre, pouvant échapper à notre pensée dite «humaine». Il n'aurait donc pas d'autres buts que de se nourrir ou encore se reproduire, et tous ses comportements devraient être interprétés en ce sens.

    Ce n'est pas parce que l'évolution impose à toute vie qui subsiste la nécessité de se nourrir et de se reproduire, que la vie animale aurait été «créée» pour réaliser ce dessein.

    Si la vie animale était bâtie pour éprouver des manques, tels que être affamé, pourquoi ne serait-elle pas aussi constituée pour en éprouver d'autres comme le besoin de déféquer ou d'uriner? Les appétences sont faites pour être assouvies, et non la vie pour les éprouver.

    Comment en est-on arrivé là?

    L'animal biologique conçoit le temps de façon cyclique:

    Dans leur obstination à concevoir un Dieu synonyme de «souverain bien», les traditions religieuses (monothéistes, surtout) ont eu tendance à séparer le bien du mal, au lieu de les percevoir comme un tout indissoluble. Ainsi on parle d'une vie créée pour «inspirer sans expirer» (croitre sans décroitre), manger, boire, naitre et ensemencer.

    Pourquoi ne pas parler d'une vie faite pour «expirer sans inspirer» (décroitre sans croitre), déféquer, uriner, mourrir, ou servir de terreau? Cela serait tout aussi possible, si la vie n'était pas le fruit d'une évolution, mais «créée»!

    C'est cette séparation, qui provoque le déséquilibre, la souffrance psychologique, et finalement l'action forcenée.

    Dire d'un goinfre, d'un tueur, d'un violeur, ou d'un obsédé sexuel qu'il agit comme un animal, est typique du raisonnement d'un «humaniste» qui se borne à imaginer l'être humain comme supérieur à l'animal, et non de l'analyse faite par un être doué d'intelligence et d'un jugement pondéré.

    L'intelligence biologique consiste simplement à vivre encore au/le moment présent. Toutes les stratégies concourant à ce but sont donc «intelligentes».

    L'intelligence cérébrale consiste à prévoir quels influx nerveux vont traverser le cerveau si telle ou telle action motrice est entreprise/contenue. Elle ne peut donc s'intéresser qu'aux mécanismes répétitifs.

    Les êtres biologiques nous entourant, étant tous le fruit d'une évolution qui nous échappe de par l'absence de caractère cyclique, il est impossible de vivre le temps présent d'une autre façon que biologique. Les religions, les philosophies, les idéologies, et même les simples idées nous éloigneront toujours de la réalité de ce qui nous entoure ici, et maintenant.


    Original: 20080828-00
    Version: 20080905-1



    mercredi 27 août 2008

    Pensée subversive n°024 "De l'amour naissant et de l'amertume"

    L'amour naissant ressemble à une graine. Tant que celle-ci est maintenue dans des conditions adéquates de sècheresse et de lumière, elle peut être conservée indéfiniment.

    De même, la faculté d'aimer, don de la nature permettant, entre autre, la reproduction, et l'éducation de la descendance, peut se conserver intacte, tant qu'elle ne rencontre pas les circonstances nécessaires à son éclosion.

    Mais, une fois les conditions d'humidité et d'obscurité rencontrées, la graine germe, et la plante qui y est contenue commence à croitre. De façon semblable, lorsque les circonstances biologiques appropriées surviennent, l'amour se développe, et entraine les comportements qui y sont liés.

    Véritable cadeau de la vie, l'amour ne doit pas être confondu avec les idées et idéaux que nous nous créons afin de tenter d'échapper à notre misère, ou à la morosité de notre existence. L'amour trouve son origine dans la biologie, et non dans la psychologie, la philosophie, ou la religion.

    Tenter de stopper, de freiner, ou de figer un amour naissant, c'est comme s'efforcer de paralyser la croissance d'une graine germée. L'exercice, s'il s'avérait possible, serait en tout cas impraticable à celui qui en ignorerait les lois de l'évolution, et donc de la chimie. Si celui-ci se hasardait à le tenter, il ne provoquerait que le dépérissement inexorable de la vie contenue dans la graine, ou de cet amour encore naissant.

    Si les plantes mortes de vieillesses, ou avortées forment un terreau, à l'intérieur duquel les graines trouvent des conditions propres à leurs germinations, les amours précocement défunts créent ensemble une amertume ambiante, dans laquelle un nouvel amour naissant se distingue aisément de son contexte.

    Trouver une cause finale à toute cette amertume, en se disant «C'est que cet amour ne devait pas se produire!», donne raison aux exterminateurs et autres tortionnaires.

    Original: 20080827-00
    Version: 20080830-1



    Qui êtes-vous ?

    Charleroi, Hainaut, Belgium
    Peu m'importe de convaincre, d'être médité, compris ou même d'être lu. Il me suffit d'être publié... "Point n'est besoin d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer" (Guillaume d'Orange).